Princess Miranda

J’ai écrit ce texte inédit en 2020-2021 pour la Cie En Avant-Scène de Géraldine Baldini (Marseille).

Il a été crée en octobre 2022 au Théâtre 108 à Aix-en-Provence.

Texte de Sabine Tamisier, d’après une idée originale et en complicité artistique avec Géraldine Baldini
Mise en scène et interprétation : Géraldine Baldini
Textes et musiques des chansons : Laurent Solférino
Tout public à partir de 9 ans.

« Miranda est une jeune autrice compositrice interprète, venue dans sa ville natale ce soir là, donner un concert. Mais un évènement bouleverse l’ordre de cette soirée, et vient douloureusement lui rappeler son enfance et son passé de jeune femme en lutte avec son apparence, son obésité. Elle va délicatement et avec humanité nous transmettre son histoire, qui peut être celle de tout un chacun. » Géraldine Baldini.

Page Facebook de la Cie : https://www.facebook.com/EnAvantScene

Un petit extrait :

Une scène presque vide, juste un synthétiseur et un micro au bout d’un pied, éclairés, au centre du plateau. Le public est déjà là, l’artiste non.
Rumeurs, chuchotements, impatience.
Soudain une porte s’ouvre dans le fond de la salle, laisse entrer de la lumière, puis claque violemment.

Une femme entre d’un pas précipité, joues rouges, poings serrés, démarche assurée.
C’est elle, la chanteuse Princess Miranda, celle que toutes et tous sont venus écouter, dans une petite ville de Province, ce soir-là…

MIRANDA.- C’est pas POSSIBLE ! Pas POSSIBLE qu’on puisse entendre encore des /
des CHOSES PAREILLES c’est / BON SANG ! AUJOURD’HUI ! Ça m’fout ça / j’trouve plus mes mots je /
J’PEUX PAS ! J’PEUX PAS faire comme si / j’avais rien entendu, non ? VU même !
J’suis vraiment confuse je sais / pas pour ça qu’vous êtes là ce soir mais / c’est plus fort / plus fort que moi ! MA MÈRE ! MA PROPRE MÈRE ! Dire ça ! L’entendre dire ÇA, LÀ, LÀ, dans le hall d’accueil, au milieu de TOUS, sans / sans aucune gêne c’est / cet APLOMB !
J’étais là, à vous accueillir tous, comme d’habitude et d’un coup une voix, derrière moi :
« Pousse-toi » elle a dit, alors que / alors qu’elle /
« POUSSE-TOI, SALE GRRROS ! » elle a fait, avec son accent, à un qui était là, alors que / qu’elle sait bien / ce que j’ai / ce que nous TRAVERSONS / tous ceux qui /
« POUSSE-TOI, SALE GROS ! ». Mais putain mais c’est QUI ? C’est / c’est ma mère ça ?!
« DEHORS ! » j’lui ai dit. « DEHORS MAMAN, TU M’FAIS HONTE ! »
« FOUS L’CAMP ! » j’lui ai fait.

Et m’voilà devant vous.
COMMENT ?
Comment j’peux faire semblant moi maintenant ? Chanter comme si rien de tout ça n’avait eu lieu LÀ, à l’instant, dans ce hall ! PUTAIN ! Oh excusez-moi les enfants, les jeunes j’veux dire, ça m’a échappé ! Elle devait pas v’nir !
Pas prévu, plus un mot entre nous, depuis des années !
J’aurais jamais crû que / qu’elle oserait je / je tremble.
Faut que ça s’calme là, mon cœur, mes mots.

J’ai bien vu qu’elle était pas dans son état normal. Vous voyez c’que j’veux dire ? Elle / vacillait.
Mais bon, ça s’excuse ÇA ?

Je sens qu’ça va pas / ça va pas être possible de CONTINUER LÀ, COMME ÇA, NORMALEMENT, directement, en chansons.
Faut que j’dise, d’abord. C’est trop plein, raz de marée !
J’veux plus entendre ÇA, d’la bouche de ma mère, ni d’celle d’aucune autre personne d’ailleurs.

Je sais pas si j’chanterai. Certainement beaucoup moins en tous cas.
J’ai besoin d’CAUSER de tout ça avec vous maintenant. Vous voulez bien ? Attention, j’veux pas vous empêcher d’partir si c’est ça que /
Non ? Bon. Merci. Merci d’rester quand même.

C’est drôle parce que justement / justement aujourd’hui, dans c’concert-là, j’voulais partager avec vous trois nouvelles chansons qui / qui parlent de ça.
Enfin, d’mon histoire quoi.
BON SANG MAMAN T’AS TOUT FAIT FOIRER !

Non, non non, c’est pas elle non, c’est moi, juste moi qui / au quart de tour j’suis partie, j’lui ai volé dans les ailes ! J’aurais pu m’contrôler, non ? J’ai appris ça, SELF-CONTROL !
Plus d’dix ans que j’l’ai pas vue / elle vient / elle fait l’pas et moi /
J’pouvais pas la laisser dire ça, non ?

Ça s’dit pas, ça doit même pas se penser des choses comme ça c’est / c’est énorme !
Mais bon, merci maman, finalement tu vois, merci ! T’as rien fait foirer du tout, au contraire, bien au contraire, ça m’permet d’ouvrir une parole, ici, ce soir, avec vous !

(…)

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Mamie elle fait que des pulls blancs parce que la neige lui manque

J’ai écrit ce texte inédit pour la Cie Le Bel Après Minuit en juillet 2021 et la Compagnie l’a créé à l’automne 2021 en région parisienne.

Mise en scène : Bénédicte Guichardon
Objets : Bénédicte Guichardon et Odile Stemmelin
Distribution : Nathan Chouchana
Régie : Antoine Cadou en alternance avec Thomas Rouleau-Gallais
Production : Compagnie Le bel après-minuit
Avec le soutien du Théâtre de Chevilly-Larue – André Malraux, de L’Ecam – Le Kremlin Bicêtre du Théâtre Jean Arp – Clamart

Encore plus d’informations en suivant ce lien vers le site de la compagnie : https://www.lebelapresminuit.com/portfolio/mamie-elle-fait-que-des-pulls-blancs-parce-que-la-neige-lui-manque/

Un petit extrait :

Un jeune homme en pull blanc, bien trop court pour lui. On voit son nombril.
Pantalon de lin ou de jute. Pieds nus.
C’est le Petit.
Il nous regarde et danse en silence, des gestes doux, répétitifs, s’accélèrent, ralentissent, saccades, envolée, un arrêt.

LE PETIT. – Vous entendez ? Non ? Ça va venir, écoutez, tendez l’oreille !
Il reprend sa danse. Envolées, gestes doux, répétitifs, ralentissent, s’accélèrent, des saccades.

Une sorte de musique au loin, celle des sons cadencés d’une machine ?

LE PETIT. – Là, vous entendez ? Oui ?
Il reprend sa danse sur cette drôle de mélodie. Il s’arrête.
Ça vous rappelle rien ? Non ? C’est normal c’est pas / pas courant comme / Moi oui. Un flot de souvenirs, tellement.

Il reprend sa danse, elle devient plus rapide, se précise, prend de la place, dessine dans l’espace des mouvements de droite à gauche, dans un sens et puis l’autre.
La drôle de musique s’amplifie, la danse aussi. Le Petit fait des sons avec ses mains sur son corps, il frappe de ses pieds le plateau, il s’élance et retombe, un peu maladroitement.
Il se pose, masse son pied. La musique faiblit peu à peu.

LE PETIT. – « T’as fini d’gigoter ?! » elle m’aurait dit Mamie. « Tu vas encore te faire mal ! »
Mamie elle pouvait pas gigoter. Elle était tombée elle aussi, une fois, une seule, avec mon papi berger, et depuis, elle avait une jambe raide. « Elle veut plus rien savoir !», elle disait, « Fichue guibole, elle sait juste les pédales de Bergljot ! ».

Il se lève, reprend quelques mouvements en silence, il s’arrête.

Bergljot c’était sa machine, son métier à tisser. Un prénom, elle lui avait donné parce que pour elle c’était plus qu’un objet, une sacrée compagnie.
Mamie. C’est pour elle que je danse.
Pour elle j’aimerais, je voudrais, devant tous, une danse, en sa mémoire, le jour de son enterrement.

C’est demain.
« Drôle d’idée » y vont m’dire mes frangins. « Un original toi, jamais pareil comme tout le monde, faut toujours qu’tu ramènes ta fraise d’une façon ! ».
MA façon oui, et j’suis sûr qu’elle plairait à grand-mère.
C’était pas une causante, une bavarde, une pipelette non. Les mots, ils lui faisaient peur je crois bien.
Alors les discours, les au revoir en grandes pompes, non. Elle aimait le silence. Enfin, un silence plein de sons et de mouvements : ceux de la nature et puis ceux de Bergljot.

Aux aurores elle se levait, comme papi d’ailleurs. Mais lui, quand je me levais, il était déjà parti nourrir puis promener ses bêtes. Elle, elle était là, près de la fenêtre ouverte sur la garrigue, une lampe allumée, ses lunettes grossissantes sur son nez, assise devant son ouvrage. Ses mains allaient d’un côté et de l’autre, tenaient la navette d’où se déroulaient le fil du dévidoir et ses pieds pianotaient les pédales de l’engin. C’est cette douce mélodie qui me tirait de mon lit.

Et aussi, celle des sonnailles des moutons, des brebis et des chèvres de papi au loin, ses cris pour les rassembler. Les aboiements de Mila et Django, ses fidèles compagnons : une border collie noire et blanche toute fine, et un berger de La Crau qui était aussi grand que moi à l’époque. Et puis celles du merle, du coucou, des martinets, des hirondelles, des corneilles, des tourterelles et là, tapis dans les herbes, toute une symphonie d’insectes chanteurs démarraient leur journée : cigales, sauterelles, criquets, ils s’en donnaient à cœur joie. J’adorais ça.

Il se remet à danser sur cette symphonie imaginaire.

Vous entendez ?

Précipices

ttps://www.editionstheatrales.fr/livres/si-jetais-grand-6-1600.html

Précipices est une coute pièce pour adolescents, que j’ai écrite en 2019 pour la Cie du Réfectoire à Bordeaux. Elle a été créé en juillet 2021 au Centre Culturel Simone Signoret de Canéjean, dans une mise en scène de Patrick Ellouz, et interprétée par un groupe d’adolescents de 9 à 13 ans.

Extrait (début du texte) :

Un groupe d’adolescents, filles et garçons mêlés.

Sur une falaise rocheuse enneigée. C’est l’hiver.

Doudounes, bonnets, gants, boots.

  1. Souvenir

– C’est ici

– Là

– Y’ a un an

– C’est ici qu’il nous a convoqués
– Normal

– Notre lieu

– Notre rencard

– Notre montagne

– Notre falaise

– Pas la sienne

– Non pas la sienne

– On le voulait pas là

– Avec nous

– Trop étrange 

– Différent

– Notre endroit quand on voulait blaguer

– Bien planqués des parents

– Il était pas pour lui

– Ouais lui il en avait plus

– De quoi ?

– De parents

– Non 

– Plus depuis le jour

– De la grande avalanche

– Le monstre blanc ils l’avaient appelée 

– Dans toute la vallée

– Elle avait avalé des enfants, des parents, grands-parents
– Bien debout sur leurs skis

– En promenades, en raquettes

– Juste ici 

– Là 

– En dessous

– Et aussi des renards des chevreuils et des cerfs

– Des brebis et des chèvres et des vaches

– Des lapins, des belettes, des marmottes

– Et les chiens

– Non pas de chiens

– Si ceux des bergers

– Oui je sais celui de mon cousin mon Patou il s’est fait emporter mais c’est pas ça que je 

– Alors quoi ?

– Je voulais dire les chiens ceux qui recherchent les gens

– Ah les héros !

– Les maousses !

– Les costauds !

– Oui ceux qui traquent les souffles

– Un battement sous la glace

– Oui ceux-là n’avaient rien pu trouver

– Rien ramener aux familles

– « La couche était bien trop épaisse » 

– Avaient dit les gendarmes

– Et leurs petites pattes bien que très efficaces

– S’étaient vite épuisées et gelées à gratter à creuser

– Sans jamais rien trouver jusqu’au printemps suivant

– A la fonte des glaces

– Ouais passe

– Quoi ?

– Les retrouvailles les funérailles

– Les corps momifiés

– Faut bien dire

– Passe j’te dis !

– Ok

– On est pas là pour ça

– On est juste là pour lui

– Oui

Silence

Danse Célestine

https://www.editionstheatrales.fr/livres/danse-celestine-1597.html

Article paru dans Télérama en juin 2021 :

Carnet pédagogique sur Danse Célestine, réalisé par Annie Quenet, à la demande des Éditions Théâtrales : https://www.editionstheatrales.fr/pedagogique/les-carnets/danse-celestine/

La Promesse

« La Promesse » a été créée en février 2021 par Morgane Le Rest (mise en scène) et Margot Madec (jeu). Production : La Maison du Théâtre de Brest.
Plus d’infos : MAISON DU THÉÂTRE DE BREST

Courte pièce pour les 3-5 ans, parue aux Éditions Locus Solus en mars 2021, dans un recueil de 6 pièces de théâtre pour la jeunesse, intitulé : « CECOI, la mer ? » (disponible dans toutes nos belles et vraies librairies !), en compagnie des 6 autres pièces des auteurs et autrices du projet de commandes d’écritures CECOI de Très Tôt Théâtre à Quimper, qui sont : Fabien Arca, Sarah Carré, Mike Kenny traduit de l’anglais par Séverine Magois, Ronan Mancec, Sophie Merceron et Karin Serres.

Voici le lien vers le site de l’éditeur :
https://www.locus-solus.fr/product-page/cécoi-la-mer

J’ai écrit ce texte en août 2020, suite à une commande pour les 4-5 ans, de la part de Très Tôt Théâtre à Quimper, sur le thème de la mer. 
C’est un court monologue de 15 mn.

Une petite, pas plus haute que trois pommes, face à la mer, sur une plage gigantesque, assise sur sa petite serviette verte, à côté de sa maman, sous un parasol rose. Elle regarde l’océan en tenant dans sa main une taie d’oreiller, son doudou, son « Chonchon », vieux bout de tissu bleu, avec un coin duquel, elle caresse l’espace juste là, entre sa bouche et son nez, l’empreinte de l’ange. Elle soupire, souvent. Elle, c’est Noémie. Elle parle, dans sa tête.


Aimé sur le seuil

« Aimé sur le seuil » est une pièce pour deux acteurs (un homme/une femme), que j’ai écrite en 2013, suite à une commande d’écriture du Centre Culturel André Malraux-Scène Nationale de Vandoeuvre Les Nancy, dans le cadre de son partenariat avec le Théâtre Universitaire de Nancy pour l’évènement «Autour du Théâtre Contemporain », édition 2013.

Ce texte est pour moi une suite à mon texte « Casa nostra », publié dans la revue Nioques#5 en 2006.

Je l’ai mise en espace en février 2013, avec les élèves du Théâtre Universitaire de Nancy, puis la pièce a été créée en décembre 2018, par la Cie de Théâtre Amateur les Les Tréteaux du Charrel (Aubagne).
Mise en scène : André Ori.
Avec : Nathalie Beaumond et Sébastien Simonin.

EXTRAIT VIDÉO LECTURE  PAR L’AUTRICE :
Aimé sur le seuil

Extrait du texte :
Il pleut sur une ville.
Et dans cette ville comme dans mille autres, il y a un immeuble.
Et dans cet immeuble comme dans tant d’autres, il y a un homme, il y a une femme.
Il y a Héloïse et Aimé.

AIMÉ. – Excusez-moi.
Héloïse ?
Héloïse ?
HÉLOÏSE. – Oui ? Qui ?
AIMÉ. – Excusez-moi Héloïse je
HÉLOÏSE. – Qui ?
AIMÉ. – Le dessus. Le voisin. Le voisin du dessus.
HÉLOÏSE. – Comment ? Comment est-ce que ? Comment est-ce que vous savez mon nom ? AIMÉ. – C’est écrit.
HÉLOÏSE. – Hein ?
AIMÉ. – C’est écrit LÀ, dehors.
HÉLOÏSE. – Ah. Oui. Suis-je bête. Je croyais
AIMÉ. – Héloïse ?
HÉLOÏSE. – Oui ?
AIMÉ. – Héloïse je
HÉLOÏSE. – Oui ?
AIMÉ. – Auriez-vous par hasard, je ne voudrais pas vous importuner mais
HÉLOÏSE. – Oui ?
AIMÉ. – Auriez-vous par hasard, dans l’un de vos tiroirs
HÉLOÏSE. – Mes tiroirs ?
AIMÉ. – Ou placards ou armoires ou buffets tables de nuit, que sais-je moi
HÉLOÏSE. – Mais enfin
AIMÉ. – Auriez-vous par hasard, de la COLLE À BOIS ?

Silence

HÉLOÏSE. – C’est pour ça ?
AIMÉ. – Hein ?
HÉLOÏSE. – C’est pour ça que vous venez me voir ?
AIMÉ. – Oui.
HÉLOÏSE. – Je croyais
AIMÉ. – Hein ?
HÉLOÏSE. – Rien. Je disais
AIMÉ. – Comment ? Héloïse vous
HÉLOÏSE. – Oui ?
AIMÉ. – Je ne vous entends pas, bien. Pas très bien. Auriez-vous
HÉLOÏSE. – Oui ?
AIMÉ. – Auriez-vous l’amabilité de
HÉLOÏSE. – Quoi ?
AIMÉ. – D’ouvrir la porte.
HÉLOÏSE. – Hein ?
AIMÉ. – La PORTE.